Dessance : fascinante créativité

Encore une ouverture qui n’est pas passée inaperçue et pour cause : Dessance est la première table d’un genre nouveau, celui du dessert à l’assiette.

Si l’on touche ici le cœur de l’identité de ce lieu, à sa voir sa définition exacte, c’est bien en s’y rendant qu’on y trouve des réponses évidentes.

Je vous le dis d’emblée j’ai adoré cet endroit, à tel point que j’y suis retourné et que j’ai attendu plusieurs visites avant d’écrire quelque chose dessus.devanture

Dessance est une adresse conceptuelle nichée dans le haut-marais qui se présente par une devanture  sobre et élégante. L’espace est organisé autour d’une longue table autour de laquelle officient le chef et ses commis sous les yeux des clients qui savourent ce spectacle unique. Je ne connais pas de proximité plus aboutie!

La décoration de tons gris clairs et le bois sont agréables car ils apportent un sentiment de quiétude et de raffinement. Ce n’est rien à coté de ce qui va suivre dans les assiettes.

Le rendez-vous est pris la première fois à 14h, après un déjeuner frugal qui laisse place à une envie de dessert. Nous partons sur la dégustation sucrée à deux : 3 desserts dont 2 de saison et 1 classique, plus mise en bouche et mignardises. Comme j’y suis retourné une seconde fois à 18h vous aurez le plaisir d’avoir un double aperçu de la carte.miseenbouche

Ca démarre par un consommé froid de mâche wasabi, glace à la poire japonaise et noisettes du piémont ! Une entrée qui réveille les papilles sans les agresser, fraiche, quasiment pas sucrée. On a envie que ça ne se finisse pas si vite… mais ça je pourrais le répéter pour tout ce qui va suivre!

burratamoutarde

On embraye directement sur le premier dessert « salé »: une burrata sur un sorbet à la moutarde, orange confites et poudre de moutarde. Des accords nouveaux  relevés par quelques jeunes pousses. On s’interroge et se regarde à chaque bouchée en souriant. C’est très original, mais plus que tout : c’est excellent. Quel travail de recherche et d’association ! Premier « wouah » qui va en précéder tant d’autres.banane

Le second dessert arrive avec cette banane marinée à froid à la vodka et au gingembre, émulsion de céleri et glace au gingembre, spéculos et fruits de la passion, citron confit ! Sacrée claque qui vous fait carrément comprendre qu’on est dans un lieu où le dessert est composé comme un plat élaboré, au cas où vous seriez un peu long à la détente… Ca se déguste tellement facilement que s’en est déroutant, jamais le sucre ne vient vous freiner ou vous empêcher de vous délecter. Biensur plusieurs textures s’harmonisent parfaitement, mais encore une fois l’harmonie des associations gustatives est bluffante.

La seconde fois nous avons eu le droit à un dessert pas encore inscrit sur la carte sur le thème de la rhubarbe et framboises. Je n’hésite pas à dire que c’était juste grandiose encore une fois gustativement et sur le plan des structures : de la framboise fraiche et déshydratée, des mousses, des crèmes, de la glace et j’en passe … du bonheur.

rhubarbe

En troisième dessert est arrivé la première fois une ode à la saison : des fraises marinées sur un bonbon de fraise, glace fromage blanc, émulsion persil, radis noirs marinés au balsamique. Acidité parfaitement maitrisée, douceur, un rafraîchissement qui passe tout seul. Si vous n’avez pas encore compris à quel point l’exigence du chef Christophe Boucher était son leitmotiv, je vous précise que le bonbon ne vient pas du commerce… S’il est un clin d’oeil aux souvenirs d’enfance de boulangerie, la comparaison s’arrête là : il est ici élaboré comme une pâte de fruit, avec une jolie puissance. fraises

La seconde fois, c’est un dessert très étonnant autour de la betterave, de chips de pousses et de chocolat non conché. Fin, frais et puissant à la fois. Juste étonnant ! Arrivé à cette étape certain pourraient être blasés mais moi je reste ébahis devant le dressage même de cette assiette : tout appel à la gourmandise.betteravechocononconché

Il faut aussi que je vous parle de cette déclinaison autour de la pomme : pomme fruit, mais aussi pomme légume avec la vitelotte que vous reconnaitrez à sa couleur violette. De la pomme verte, de la gelée, du granité, et de la glace comme autant de manière d’exploiter le meilleur de ce fruit.pommes

On se dit enfin qu’on a à peu près tout vu et c’est alors qu’arrive l’apothéose pour les amateurs de chocolat comme moi. Et je vous arrête tout de suite, ce n’est rien d’un dessert au chocolat de plus sur une carte : feuillantine fleur de sel mousse chocolat, crème vanille, glaçage chocolat noir croustillant praliné et guimauve de caramel amer ! C’est vrai que c’est appétissant mais on ne se doute alors pas du travail de construction que ce dessert renferme.

photo 1_Fotor

Je vous gratifie d’une seconde photo pour mieux comprendre la structure interne de cette « barre » qui rends fou. Deux étages de pur bonheur, le chocolat craque à chaque coup de fourchette, et une fois les papilles rassasiées, la longueur qui reste en bouche est mémorable…photo 2_Fotor

La seconde fois un final tout aussi puissant en saveur (et toujours hyper raisonnable en sucre, sinon une telle dégustation ne serait pas tolérable) : la déjà mythique omelette norvégienne, fumée au sapin et flambée au whisky. Evidement montée à la minute, on savoure dès les premiers coups de cuillère la légèreté de sa texture et son parfum.

omelette

Difficile de ne pas craquer devant un tel dessert. Un monument ! J’étais presque frustré de ne pas l’avoir goutée la première fois, et voila qui fut rétabli aussitôt par le chef clairement à l’écoute des gourmands.

Pour finir (il faut bien !) quelques mignardises, autour de la passion : glaces, guimauves… Frais et long en bouche comme pour nous rappeler encore longtemps ce moment hors du temps. photo 3_Fotor

Des accords très pointus avec des boissons (alcoolisées ou non) sont proposés, parmi lesquelles des bières à l’ancienne étonnantes, des whiskies japonais ou encore des jus de rhubarbe. Beaucoup de (belles) découvertes dans ce domaine également.

A noter aussi qu’une équipe particulièrement attentionnée, souriante et bien formée agrémentera de la plus agréable manière votre « expérience ».

Vous l’aurez compris on ressort véritablement de ce lieu avec le sentiment d’avoir vécu quelque chose. Une qualité qu’on ne peut imaginer depuis l’extérieur.
Autant d’exigence du détail relève de l’art. Toute l’oeuvre de Christophe Boucher, le chef passé au grand Véfour et chez Ledoyen, se savoure. On est loin de tout ce qu’on peut imaginer. Il nous emmène dans son univers raffiné, lui qui n’aimait pourtant pas le sucre quand il a débuté ! (je vous ai concocté une petite interview à lire très bientôt).

C’est Philippe Baranes (du Braisenville dans le 9eme) qui est allé le chercher, lui qui est à l’origine de ce projet un peu fou. Quelque part il offre la possibilité à tous de déguster des desserts de restaurants étoilés, pour une addition incomparablement plus légère.
Si le concept existe déjà à l’étranger, c’est bien d’un lieu unique en France à ma connaissance dont nous parlons ici. Et vous l’aurez compris, ce n’est pas sur ce seul critère de singularité que ce lieu mérite une visite au plus vite !

Desserts autour d’une vingtaine d’euros. Dégustations à partager pour une quarantaine d’euros (recommandée).

Dessance
74, rue des archives
75003 Paris
+33 1 42 77 23 62
 
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